L’accueil en Passerelle

Un petit écrit de Nathalie & Camille, qui ont réfléchi en 2022 à ce dispositif particulier dans leur travail:
A propos de la table extérieure, devant le camping-car de la Passerelle.

1. Ce qu’on a cru – le projet initial

Le projet initial de la Passerelle ne prévoyait pas un espace collectif, hors des démarches administratives prévues par ce bureau mobile, ayant des a priori sur la confidentialité. Le projet était de mettre à disposition un bureau, avec une mission principale d’ouverture de droits.

2. Ce qui a été investi

C’est la table et les quatre chaises* dehors, entouré de bandeaux, un « sas » / salle d’attente, avec des boissons, de la documentation diverse non triée dans un carton, un cendrier et un dictionnaire. Les « clients » et les passants contribuent à la boîte, aux snacks.
*Pas plus de quatre chaises pour que cela reste un espace de travail.

3. Ce que ça créé

Cet espace produit du lien social, une fraternité / adelphité, une sorte de pair-aidance spontanée et informelle, une entraide mutuelle, des échanges de savoirs et un partage de connaissances, de l’auto-formation et un apprentissage inversé (sur les thèmes de la prison, des drogues, de la psychiatrie, de la prostitution / travail du sexe…).
On observe alors comme un atelier de rétablissement non institué, de la réduction des risques, de l’éducation thérapeutique, un accès à une citoyenneté par de l’instruction civique, l’accès à des droits fondamentaux par le biais d’une forme d’éducation populaire. Le tout avec la curiosité bienveillante des passants qui déstigmatise.

4. Ce que notre présence / le cadre permet

On offre un cadre sécurisant, garant du respect et de l’intégrité des personnes. On accueille, avec une écoute fine et un laisser-dire ; un aller-vers dans la posture, à un point fixe et régulier mais à l’air libre. On porte une présence sociale[1], on fait attention à l’ambiance et la parole se déroule, sur un temps long, au rythme des semaines. On fait office de filet, un étayage qui fait lien, rompt l’isolement et qui permet à certains d’entrer en relation avec autrui sereinement.
On se positionne sans un savoir qui ferait loi, on fait s’interroger les clients sur ce qu’ils apportent, au-delà d’un questionnement moral. On guette les ouvertures pour aller parler plus confidentiellement ailleurs (plus loin ou dans le camping-car).

Ce lieu qui réchauffe est un préalable pour commencer quelque chose.


[1] A propos de la notion de « présence sociale » :
Les cahiers de la rue « Dans la phase d’implantation, je fais du travail de rue et au fur et à mesure que je suis admise/reconnue dans le territoire, je ferai davantage de présence sociale. Dans le travail de rue je vais vers ; dans la présence sociale, je montre ma disponibilité, on vient vers moi. Ce sont les deux lignes de force qui organisent l’intervention. Les deux modalités ne sont pas parfaitement étanches mais elles sont surtout labiles, on passe de l’une à l’autre. »


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